URGENCE ! MON HÔPITAL BRÛLE
Ce jeudi 14 novembre 2019, après maints avertissements et coups de semonces, dont une grève massive et de longue durée qui a mis en lumière ces difficultés que rencontrent les services des urgences, la communauté hospitalière est dans la rue pour dénoncer une mise en faillite organisée de notre système de santé et défendre l’hôpital public.
Loin d’être catégoriels ou corporatistes, comme tendent à nous les présenter certains commentateurs des soubresauts de la vie sociale et politique Française, ces mouvements sociaux de grandes ampleurs s’organisent autour d’une volonté de privilégier l’intérêt général tout en nourrissant l’ambition de défendre le bien public et de dénoncer ces poisons qui le rongent de l’intérieur. Des poisons qui ont notamment pour noms T2A, pour Tarification A l’Activité et ONDAM (Objectif National de Dépenses de l’Assurance Maladie).
SUPPRIMER LE FINANCEMENT DES HÔPITAUX PAR LA T2A :
Instaurée en 2004, la T2A représente aujourd’hui 70 % des ressources des hôpitaux publics. Elle est également le mode de financement des établissements de santé privés. Comme son nom l’indique, elle rémunère les établissements en fonction de l’activité médicale qu’ils réalisent. Elle s’applique aux activités de médecine, de chirurgie, d’obstétrique et d’odontologie.
Censée rationaliser les dépenses des hôpitaux, la T2A est surtout critiquable pour la « course à la rentabilité » qu’elle induit insidieusement. Elle peut, en effet, inciter à réaliser le plus d’activité possible, pour ramener de l’argent à l’hôpital. Elle peut de même encourager les établissements hospitaliers à mettre l’accent sur les activités les mieux rémunérées. En effet, toutes les activités ne sont pas valorisées de la même manière : si l’acte technique (comme les interventions chirurgicales) est bien rémunéré, la prévention ou la longue prise en charge (psychiatrie, maladies chroniques, suivi des personnes âgées) l’est beaucoup moins, voire pas. Or, l’hôpital ne peut pas se spécialiser dans les activités rémunératrices et délaisser les autres, au risque de faillir à sa mission de service public.
On peut donc considérer, qu’à bien des égards, la T2A place inéluctablement l’hôpital dans une situation financière compliquée.
Autre point de crispation : l’évaluation des tarifs.
S’il est vrai que depuis quinze années l’activité des hôpitaux a globalement augmenté, l’Etat a concomitamment, dans un mouvement de balancier condamnable, réduit les tarifs ; et ce aux fins de contenir l’évolution des dépenses de santé et le déficit de la Sécurité sociale. Protagonistes impuissant d’un cercle vicieux, les praticiens sont alors obligés d’en faire davantage pour que l’hôpital espère conserver les mêmes ressources.
SORTIR DE LA DICTATURE DE L’ONDAM :
A l’heure où les députés s’apprêtent à examiner le Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), les regards sont braqués sur un seul chiffre : 2,5 %. C’est en effet le taux de croissance de l’Objectif National de Dépenses de l’Assurance Maladie (Ondam) qu’a fixé le gouvernement pour 2019.
Ce chiffre indique voire fixe l’ampleur des restrictions budgétaires auxquelles seront confrontés pour l’exercice 2019, les professionnels de santé.
L’augmentation de celui-ci pour 2019 a été fixée à 2,5 %, ainsi que l’a annoncé le gouvernement au mois de septembre dernier. Ce qui veut dire que les dépenses de santé remboursées par l’Assurance maladie pourront en 2019 être supérieures de 2,5 % à celles de 2018.
Une augmentation certes ! Mais d’un budget grevé par une quête systématique d’économies.
Il faut, en effet, savoir que sous le double effet du progrès médical et du vieillissement de la population, le taux de croissance naturel des dépenses de santé est de l’ordre de 4,5 % par an. « Un Ondam à 2,5 %, ce sont donc encore des mesures d’économies », souligne le sociologue et spécialiste des politiques de santé Frédéric PIERRU. Pour pouvoir respecter les 2,5 % d’augmentation de l’Ondam, le Rapport Economique Social et Financier (RESF) publié début octobre par la direction du Trésor prévoit donc des restrictions s’élevant à 3,8 milliards d’euros.
Ainsi, tant que l’objectif premier de nos gouvernements demeurera l’équilibre des finances et la maîtrise des dépenses de santé, force nous est de constater que la réforme de l’hôpital public se fera au détriment de l’offre de soins et de la santé en général. Suppressions de lits, fermetures d’établissements de proximité et recrutement du personnel n’obéissant plus qu’à une logique de rentabilité.
En l’espèce, parce que le droit à la santé est un droit fondamental et sa défense une exigence citoyenne, le collectif AGIR POUR BESSANCOURT, constitué tant d’usagers de ce service public que de professionnels y exerçant, a rejoint la communauté hospitalière dans les rues de Paris ; se reconnaissant derrière cette lutte qu’elle mène et à travers les revendications dont elle est porteuse. Nous leur apportons notre indéfectible soutien.
Toutefois, sur cette question primordiale, nous ne pouvons malheureusement que regretter le silence assourdissant de nos politiques locaux, lesquels plus intéressés par leur hypothétique réélection perdent de vue l’essentiel : L’HOMME